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Ellory, R. J.

Les Anonymes

vendredi 15 mars 2013, par webmestre

Sonatine Éditions [A Simple Act of Violence, Orion. Traduction de l’anglais par Clément Baude], Paris, 2010. 692 p.

J’avais lu, bien évidemment, le titre Vendetta, puisque les critiques portent l’auteur en bonne estime. Je dois dire que, malgré l’épaisseur de la brique, nous en apprenons bien peu. Certes, le livre fait état de révélations et d’analyses importantes, sinon capitales, pour affiner une certaine compréhension du monde et le regard critique. De toutes ces 690 pages, les dernières éblouissent, elles émeuvent. Les informations trouvées sur ces derniers feuillets sont les bienvenues, elles nous soulagent et nous donnent enfin des points de référence. Cependant, ce contentement est-il le bienvenu parce que la mise en place a été longue ? trop longue ?

Pour ma part, j’aime bien le quotidien des enquêteurs, et le portrait que fait Ellory de son personnage Robert Miller, inspecteur attaché au commissariat du 2e district de la ville de Washington DC, est satisfaisant. Sa vie, pas trop tranquille, sera transformée par l’enquête dont il est question dans le livre. Enfin, transformée ?, on ne le saura vraiment bien qu’à la fin si l’inspecteur sera transformé, car pendant l’essentiel du livre, c’est l’enquête... qui piétine et livre très peu d’indices, sinon beaucoup de mystère. C’est peut être ici que le roman est le plus faible : parce qu’Ellory aime bien nous faire partager ses découvertes et quelques convictions sur l’administration des États-Unis, ses dessous, ses travers, les groupes occultes qui en détiennent le pouvoir réel, Ellory donc, nous livre en parallèle les réflexions d’un second personnage important. Comme une sorte de monologue, ces réflexions nous livrent des informations qui manquent à l’inspecteur. Transmises comme en pointillé au cours de la lecture, les informations portent parfois ombrage à l’intrigue. Cette structure qui est bien équilibrée a cependant en contrepartie un effet inverse qui désamorce tout suspense. Pour nous, lecteur, il n’y aucun mystère. C’est peut être pour notre plus grand bien, cela dépend comment on voit les choses.

p. 112

« J’ai même entendu parler d’homéopathes qui utilisent la vitamine K contre le cancer. Mais en général l’administration leur tombe dessus et ils s’enfuient au Mexique.
 Pourquoi ?
 Pourquoi le Mexique, ou pourquoi est-ce qu’ils se font allumer par l’administration sanitaire ?
 Pourquoi est-ce qu’ils se font allumer ?
 Eh bien, parce que la vitamine K est censée marcher mille fois mieux que la plupart des autres médicaments... Parce que ce n’est pas cher, parce que vous n’avez pas vraiment besoin d’avoir une grande expérience médicale pour l’administrer, que sais-je encore ? Ce ne sont que des hypothèses, mais je sais d’expérience que l’administration sanitaire déteste voir des gens pratiquer des choses qui ont l’air de faire du bien. »

Miller eut un sourire caustique. Pour une femme de son âge, Marilyn Hemmings était trop cynique.

[...]

 Vous êtes d’uin profond cynisme, remarqua Miller, une fois encore surpris par les propos de Marilyn Hemmings.
 Cynique, moi ? Réaliste, je dirais. Je vois ce que ces connards font tous les jours, inspecteur. Vous aussi, j’en suis persuadée. Mais, moi, j’y ai droit en direct. Sur combien de meurtres avez-vous été envoyé cette année ?

[...]

 Eh bien, pour le moment, le coroner n’étant pas là, il y a moi, Tom Alexander et deux autres personnes à tour de rôle. On couvre les juridictions de onze commissariats de police, et même quinze en comptant les trop-pleins qu’on se partage avec Annapolis et Arlington. Mon établissement peut recevoir quatre cents corps en même temps, avec une chambre froide qui, en cas de besoin, peut en contenir cent cinquante supplémentaires. Sur les six cents cadavres que l’on traite chaque mois, 68 % sont des victimes d’assassinats ou de meurtres, des accidentés de la route avec délit de fuite, des noyés et des suicidés. Là-dessus, au moins deux cent soixante-quinze sont des homicides, avec certaines choses... Enfin ai-je vraiment besoin de vous expliquer ce que les gens sont capables de se faire les uns aux autres, inspecteur ? »

p. 126

J’ai repensé aux quatre nobles vérités du bouddhisme : toute l’existence n’est que souffrance, le désir de vivre est la cause des vies répétées, seule l’annihilation du désir permet la délivrance, enfin la seule issue possible reste l’élimination de l’égoïsme. J’ai repensé au niveau de bêtise que j’avais atteint.

p. 210

Ford apprit ainsi que la gestion directe des tentatives d’assassinat de Castro par Robert Kennedy n’était que la partie émergée d’un gigantesque iceberg. Cet iceberg descendait jusqu’à des profondeurs abyssales - insondées, inexplorées, inconnues.

p. 375

Ne vous embêtez pas, Audrey, dis-je calmement, je vais les attendre ici.

C’est à partir de cette phrase, bouleversante en contexte, que les choses ont changé.



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